Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
9 mai 2011 1 09 /05 /mai /2011 11:05

Dans le cadre du festival Quais du polar, fin mars à Lyon, des étudiants du groupe C1 ont participé au concours de nouvelles. Il fallait écrire un texte de 6000 signes maximum sur le thème "juste avant la nuit" avec une forme libre et une ambiance d'histoire policière.

Nous allons mettre ces textes en ligne au cours du mois de mai.

Voici donc le premier :

 

 

 

UN FIL BIEN UTILE

 

Une volée d’oiseaux noirs dans le ciel gris. Ici, beaucoup d’oiseaux par rapport à Lyon. Mais ces oiseaux ne me plaisent pas du tout. Déjà 18 h. Juste avant la nuit. Je dois partir bientôt pour voir ma mère. Aujourd’hui rien de particulier sauf qu'une dame a mis ses excréments sur le mur de sa chambre. En fait, ce n’est pas ma responsabilité. Je voulais un peu aider Leticia qui déteste vraiment nettoyer les excréments de sa patiente. Au bout de quelques jours, c'est devenu ma charge. Elle ne m'a même pas remerciée. Moi, trop gentille avec les gens. Mais, les travailleurs étrangers, moi y compris, travaillent beaucoup plus que les Français, surtout les jeunes femmes françaises occupées à bavarder. Bon, cette dame était professeur à l’université. Elle utilisait souvent des mots très difficiles que je ne comprenais jamais. Ah, j’ai oublié de demander plus de déodorisant à sa fille. Il faut aérer encore une fois demain. Voilà ! Très contente de faire du rab.

 

Je dois voir la directrice avant de partir pour demander mon congé. Ce sera difficile. Pas assez d'employés en ce moment et pour les étrangers, il y a du travail pour quelques mois seulement. Ce sera dur. Mais j'ai besoin de ce congé pour l’opération de ma mère. Allez ! Courage.

 

Comme toujours, très nerveuse avant de frapper à la porte de mon patron qui déteste être dérangé. Normalement, elle reste dans son bureau jusqu’à ce que tous les employés soient partis.

 

Toc, toc.

 

Pas de réponse. Toc, toc.

 

Bizarre, mais je ne peux pas rester toute la soirée devant la porte.

 

J’ouvre. Silence.

 

Son fauteuil me tourne le dos. Qu'est-ce qu’elle regarde par la fenêtre ?

 

Ah ! Encore les oiseaux noirs. Je ne les aime pas.

 

Excusez-moi, madame.

 

Pas de réponse. Je suis sûre qu’elle est très en colère. Oh ! Pourquoi j’ai ouvert sans attendre sa permission. Quelle idiote ! Je n'aurai pas mon congé !

 

Je suis désolée madame mais,

 

Mais, mais quoi ? Oublie le congé.

 

C’est bizarre.

 

Sa main posée sur son bras n’est pas normale. Cette couleur, je l'ai vue une fois avant. Une fois dans ma vie, quand j’ai trouvé le corps du patient décédé. C’est la même. Je le jure.

 

Un brouillard comme souvent un matin de février en France. Le soleil de mon pays me manque beaucoup. Aujourd’hui, il est vraiment épais. Rien, je ne peux rien voir. La flèche du toit au-dessus du brouillard. Elle sort comme un monstre gigantesque. Mais, franchement, elle est très belle. Aucune idée sur son utilité. S’il y avait de l’eau autour de la maison de retraite, ce serait Azay-le- Rideau, un château de la Loire, bâti entre 1518 et 1527 sur une île au milieu de l’Indre. Je l'ai visité l'an dernier. Toujours un grand plaisir d'entrer dans la maison, mais pas aujourd'hui.

 

Les patients ne savent pas encore que la directrice est morte. La police va faire son enquête non seulement sur les employées, mais aussi les patients. Aucune visite hier. Ah ! Sauf la fille de cette dame. Mais tous les jours. Donc, pas de visite particulière. Nous contrôlons sévèrement les allées et venues. Forte chance que le tueur ou la tueuse soit dans cette maison. La journée a commencé comme d'habitude malgré cette affaire.

 

Peut-être que personne n’est attristé par la nouvelle. Une femme d’âge moyen, très nerveuse, hystérique, d'un tempérament sanguin et maltraitant souvent les patients spécialement ceux en retard pour le paiement. Elle était comme la reine de ce château.

 

Lumière dans la cuisine. Il est déjà là. La première personne qui allume le chauffage qui ne marche jamais bien. Au moins qu’on l'utilise jusqu’à l'arrivée du prochain directeur. Bien, certains patients montent au ciel plus tôt grâce à ce chauffage. Aujourd’hui, les visiteurs, policiers, enquêteurs, fonctionnaires vont chauffer cette maison.

 

Bonjour.

 

J’aime son sourire. Son tablier est toujours comme neuf.

 

Les autres arrivent en chuchotant. Pourquoi ils me regardent ainsi ?

 

Le témoin est le premier suspect.

 

Comment ?

 

Mais, je te crois.

 

Ah, bon ? Merci beaucoup ! C’est l’heure d'apporter les repas.

 

Ses yeux étaient ouverts à moitié. Son visage était celui d'une geisha. Les traces des lignes sur son cou apparaissent nettement. Elle a été étranglée. Mais, rien n’était en désordre. S’il y avait eu une petite bagarre, je m'en serais aperçue. Le crime a été très rapide, fort, et organisé. C’est-à-dire que le fil autour de son cou était probablement fin et résistant. Sinon, elle se serait débattue. Mais, qui ? Pourquoi ?

 

Leticia se dispute avec la fille de la patiente. Elle a encore jeté ses excréments mais cette fois Leticia semblait être vraiment fâchée. Elle lui a enlevé tous ses vêtements et ouvert toutes les fenêtres donc cette pauvre dame était toute nue dans le froid. Malheureusement, sa fille est arrivée au bon moment. Portée plainte, elle a dit. Ca ne m’étonne pas. Cette maison a déjà été accusée de maltraitance. Les gens se blessent plus ici que dehors. Un patient s’est suicidé à cause de la violence de la directrice. Mais, elle a été remise en liberté faute de preuves. On peut dire simplement « il a l'Alzheimer ». Je n'entrerai jamais à la maison de retraite comme patiente. Ma famille non plus.

 

Déjà 18h, rien de particulier, sauf que deux enquêteurs ont cherché quelque chose toute la journée. La porte du bureau est semblable à hier, excepté le ruban barré.

 

Lumière dans la cuisine.

 

Au revoir chef.

 

C’était dur hier ?

 

Ben, je sais pas. Difficile ta question ! Chef, vous préparez quoi ? C’est pour demain ?

 

Rôti de porc.

 

J’ai essayé de le faire chez moi, pas facile.

 

Il faut bien attacher les blocs de porc pour que le jus ne s’échappe pas. On en mangeait tous les dimanches chez ma mère.

 

Et maintenant ?

 

Elle est décédée il y a 3 ans. C’était un suicide.

 

Excusez-moi, je le savais pas.

 

C’est pas grave.

 

Je vais vous laisser.

 

Tu sais ? C’est mieux pour les patientes. Il tire sur le fil solidement.

 

Pardon ?

 

A demain.

 

Il a plu toute la journée et il fait froid. Pas d’oiseaux aujourd’hui.

 

Dépêche-toi, maman t’attend.

 

 

                                                                                  Jimin LEE, coréenne.

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires